Maison sous­traire

Actuellement visible dans l’exposition “Soleil·s

Le projet Maison Sous­traire est né d’une expé­rience radi­cale de réduc­tion d’objets du quoti­dien menée par Mathilde Pellé dans son appar­te­ment, à Saint-Étienne. Pendant huit semaines, deux tiers de la matière des cent douze objets occu­pant le lieu ont été reti­rés ou trans­for­més de manière à inter­ro­ger leur néces­sité, leur maté­ria­lité et leur impact. Dans cet envi­ron­ne­ment dépouillé, recons­ti­tué ici pour les visi­teur·euses, la desi­gner aborde fron­ta­le­ment les enjeux de sobriété.

© Mathilde Pellé

© Mathilde Pellé

© Mathilde Pellé

Mathilde Pellé a aban­donné tout super­flu. Elle a sous­trait les pieds et le dossier du canapé, le bois qui cache la struc­ture de l’éta­gère, les portes et les panneaux du placard, la struc­ture du lit, la colonne en céra­mique de l’évier, le revê­te­ment de la baignoire, le rembour­rage de la chaise ; elle a éliminé les couverts et les usten­siles de cuisine jusqu’au strict néces­saire. Doit-on y voir une bifur­ca­tion radi­ca­le­ment décrois­sante ? une dissec­tion de tout ce qui est inutile ? une recherche de l’in­dis­pen­sable ? une attaque dans la chair du maté­ria­lisme ? Dans cette expé­rience, Mathilde Pellé a vécu dans, ou plutôt avec ces sous­trac­tions domes­tiques : elle était alors desi­gner, cher­cheuse et habi­tante à la fois.

Desi­gner parce qu’elle travaille sur les formes des objets et des agen­ce­ments. En sous­trayant, elle remet en cause les formes et les matières issues de déci­sions liées aux stan­dards, aux coûts, aux logiques de produc­tion et du marché impo­sées par les logiques indus­trielles. En sous­trayant, elle propose une maté­ria­lité a minima, élimi­nant tout super­flu. Cher­cheuse ensuite, parce que chaque objet a été iden­ti­fié, suivi et docu­menté tout au long du proces­sus, de l’achat à son usage – en même temps que chaque habi­tude ou geste. Habi­tante enfin, parce qu’elle a recon­fi­guré ses propres inter­ac­tions. La fragi­lité d’une four­chette lui enseigne, par exemple, la déli­ca­tesse de l’acte nour­ri­cier. Par une immer­sion inti­miste dans l’es­pace ainsi trans­formé, Meublé, le film de Jean-Baptiste Warlu­zel révèle d’au­tant les gestes et ajus­te­ments qui accom­pagnent le dépouille­ment de Mathilde Pellé.

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